«Le journalisme civique vise à fournir aux gens des possibilités d'intervention afin de les amener à agir, et encourager l'interactivité entre les journalistes et les citoyens. Il cherche à créer un dialogue avec les lecteurs, au lieu de se borner à transmettre les informations en sens unique et à inonder le public de données, comme cela se passe si souvent dans le journalisme traditionnel.»


— Jan Schaffer, directeur du Pew Center For Civic Journalism

05 avril 2006

Région à vendre : citoyens dociles, élus conciliants


La condomisation des montagnes, un acte d'agression visuelle

À l’intention de ceux qui s’intéressent aux impacts reliés au développement domiciliaire de notre ville et de la région des Laurentides ou qui doutent encore des bouleversements qui s’annoncent, voici quelques extraits éloquents tirés du document Pour prendre une décision éclairée, que l’on peut consulter sur le site de Attitude Nord, promoteur immobilier de Sainte-Adèle.

Notre ville « revit » enfin! (Je ne savais pas qu'elle était morte)
«Après avoir connu quinze années de statu quo dans la construction, la ville (Ste-Adèle) revit depuis deux ans et bat tous les records de mises en chantiers domiciliaires avec des résultats tels que 173 permis émis par la ville jusqu’en juin 2005 comparativement à 88 en 2004.»

«En 2003, la Société générale de financement du Québec (SGF) mentionnait que la région des Laurentides pourrait jouer un rôle majeur dans l’économie nord-américaine et mondiale avec une croissance démographique quatre fois supérieure à celle du Québec pour la MRC des Laurentides.»

Cap au nord
«Les baby-boomers constituent la tranche de population la plus importante depuis 60 ans et conséquemment, elle domine les tendances immobilières et/ou de consommation. Maintenant à l’aube de la retraite, nombreux sont ceux qui quittent la grande ville ou la banlieue pour migrer vers les zones de villégiature. Ce phénomène est particulièrement observable dans les Laurentides et on prédit même qu’il s’accentuera au fil des ans avec l’augmentation de la cohorte des baby-boomers atteignant l’âge de 55 ans et plus. Ainsi, l’Institut de la statistique du Québec prévoit une augmentation de population d’ici 2026 de l’ordre de 43% dans les Pays-d’en-haut contre seulement 14,8% pour Montréal et 9,3% pour l’ensemble de la province de Québec. Des chiffres qui en disent long sur le potentiel de retour sur l’investissement immobilier dans la région. Déjà, le nombre de résidents permanents dans les Laurentides a augmenté de 20,7% entre 1994 à 2003, passant de 326,000 à 393,000. Ceci classe la région au premier rang pour ce qui est de la hausse de population au cours de ces neuf années au Québec. Également, selon l’étude de février 2005 de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), pendant que la construction connaissait en février une baisse de 54% sur la Rive-Sud et demeurait stable à Laval, elle augmentait de 16% sur la Rive-Nord. De plus, alors que le prix moyen a bondi de 15% dans les Laurentides, il a reculé de 1% à Montréal selon la Chambre immobilière du Grand Montréal (CIGM).»

Réfléchir avant de bâtir
Je sais que plusieurs lecteurs de ce carnet et du Carnet de Sainte-Adèle, estiment que mes opinions sont parfois trop tranchantes concernant le développement domiciliaire de notre ville et de la région des Laurentides. On me reproche également l’utilisation de termes tels que : bactérie mangeuse de paysage, dévisagement paysager et projets récréopathétiques. À la lumière de ces extraits, je crois qu’il n’est pas alarmiste de dire que notre région et notre ville seront de plus en plus convoitées par les promoteurs. Prenant des allures de bonnes nouvelles, les statistiques présentées par Attitude Nord nous annoncent aussi de grands bouleversements. Sommes-nous préparés à gérer ces bouleversements? Avons-nous bien évalué tous les impacts d’un boom immobiliers sur notre environnement, notre mode de vie, notre identité? J’en doute fortement.

La voix des promoteurs est envoûtante et douce aux oreilles des élus et des chambres de commerce. La région des Laurentides, ses villages, ses paysages, son patrimoine, ses gens sont menacés par l’appétit gargantuesque des promoteurs pour nos collines vertes. Le buffet est ouvert et tous se goinfrent sans retenue. La machine à « progrès » avance inexorablement, laissant dans son sillage un paysage écorché, dénaturé, conquis. Le « boom » risque de se transformer en «flop» monumental si cette croissance n’est pas balisée.

Depuis mon arrivée à Sainte-Adèle, en 1998, force m’est de constater que les antennes se multiplient sur les sommets des montagnes, que les projets de condos se répandent comme de la mauvaise herbe, que le trafic routier dans la ville et sur la 15 est à la hausse ainsi que les décibels. Le Sud avance, lentement, mais sûrement.

Soyons vigilants
Les prochaines années seront décisives. Les citoyens devront apprendre à se mobiliser davantage et à relever l’échine afin d’endiguer cette vague de développement anarchique. Nous devons absolument établir des critères qui permettront de qualifier les projets soumis et développer des outils de consultation efficaces afin d’inclure les populations concernées dans le processus de décision.

Nous devrons relever le défi d’un développement responsable et durable.

2 commentaires:

Anonyme a dit...

...établir des critères...outils de consultation efficaces...inclure les populations concernées...

Ça s'appelle de l'urbanisme et de la démocratie. Tout cela est déjà en place. Merci quand même d'y avoir pensé.

Vous pensez sérieusement M. Bérard que la population est assez mature pour gérer le développement des Laurentides?

Permettez-moi d'en douter.

Il ne faut pas oublier une chose: une ville ne peut pas empêcher le développement sur son territoire. Elle ne peut que l'encadrer. Les mouvements démographiques sont également hors de son contrôle.

Que nous reste-t-il comme citoyen pour résister à l'envahissement du sud, comme vous le dites?

Malheureusement pas grand chose d'autre que de déménager nos pénates ailleurs.

Vision défaitiste? Je ne crois pas, plutôt vision réaliste

André Bérard a dit...

Soyez rassuré, j'avais saisi qu'il s'agissait de démocratie et d'urbanisme. Je n'ai jamais pensé avoir fait la découverte du siècle, mais souvent, il y a seulement apparence de démocratie et apparence de consultation. Il est parfois bénéfique de rappeler qu'il existe des leviers que les citoyens ordinaires peuvent actionner.

À mon avis, vous sous-estimez la capacité de la population à gérer le développement des Laurentides. En fait, ce qui manque vraiment c'est la volonté de le faire, mais je crois que la capacité est là. Il existe une sorte de léthargie chez les populations souches de cette région. À Montréal, dans certains arrondissements, les citoyens sont parvenus à stopper les élans de certains promoteurs. La chose est donc possible si la volonté est de la partie.

Je trouve votre vison défaitiste en effet, même si souvent je la partage. Historiquement, la région des Laurentides a toujours été en quête d'une identité. Arrivera-t-elle un jour à la trouver? Bien malin qui peut répondre à cette question. Je le souhaite. Est-ce que j'y crois, je suis incapable de répondre à cette question par un simple oui ou un simple non.

Ma réflexion se poursuit et s'enrichit des commentaires comme le vôtre. Pourquoi ne pas le signer?

AB