«Le journalisme civique vise à fournir aux gens des possibilités d'intervention afin de les amener à agir, et encourager l'interactivité entre les journalistes et les citoyens. Il cherche à créer un dialogue avec les lecteurs, au lieu de se borner à transmettre les informations en sens unique et à inonder le public de données, comme cela se passe si souvent dans le journalisme traditionnel.»


— Jan Schaffer, directeur du Pew Center For Civic Journalism

27 août 2006

Le message de la bouteille

J’écris ce billet sous l’emprise de la rage et de l’écœurement devant l'inconscience. Je ne veux pas parler du Liban ou d'autres conflits qui sévissent un peu partout sur cette malheureuse planète. Je veux parler d’une inconscience à plus petite échelle. Une inconscience qui mène à poser des gestes en apparence banals et dans lesquels prennent racine les grands conflits. Je veux parler du je-m'en-foutisme qui semble s’enraciner chaque jour davantage dans notre quotidien.

Hier, nous nous sommes payé une petite randonnée en kayak au lac Rossi, dans le parc du Mont-Tremblant. Lors d’une pose sur une des nombreuses plages du lac, nous sommes tombés sur une manifestation flagrante d’inconscience et de malveillance. La plage était jonchée d’éclats de bouteilles de bière. Sur une distance d’environ cinquante pieds, des dizaines de tessons étaient disséminés juste sous la surface de l’eau. Certains éclats semblaient avoir été placés dans le seul but de blesser quelqu’un. Moi et ma copine avons passé près d’une heure à faire le ménage en prenant soin de ne rien oublier. L’an dernier, nous avons rempli au bas mot une quarantaine de petits sacs à ordures de débris de toutes sortes jetés un peu partout dans les lacs et sur les rives. Les parcs nationaux sont des biens publics, notion qui manifestement échappe à monsieur et madame tout-le-monde.

En arrivant au lac, une agente nous informait qu’il était interdit de pêcher. «Nous venons d’aviser tous les campeurs» a-t-elle rajouté. Sur le lac, j’ai vu un père qui pêchait avec son fil, faisant fi de la consigne. J’imagine l’excuse: «je suis venu ici pour pêcher avec mon fils et personne ne m’en empêchera». Ce père venait de manquer une occasion unique d’inculquer la notion de respect à son enfant. Au contraire, il venait de lui enseigner que l’environnement, c’est quelque chose qu’on utilise à ses propres fins en dépit des impacts négatifs. Nous sommes venus, nous avons vu et nous avons vaincu! S’il n’en tenait qu’à moi, je chasserais ces petits Césars de pacotille à grands coups de latte hors du parc!

Un peu plus tard, un hydravion s’est posé sur le lac, alors qu’il est strictement interdit aux avions privés d’amerrir sur les lacs du parc. Le pilote n’était pas en difficulté. Il a simplement fait un petit tour dans un des campings et a redécollé. Ce bon petit bourgeois avec son joujou à 140 000$ se croyait probablement tout permis. J’ai noté le numéro d’identification de l’appareil et je l’ai photographié. J’ai ensuite porté plainte à l’accueil du parc et leur ai laissé dans le même élan le sac de tessons de bouteilles. S’ils ne font rien, je porte plainte directement à transport Canada.

Pour terminer la journée, j’ai brisé ma pagaie.

Depuis trois ans, le nombre de visiteurs dans le parc ne cesse d’augmenter. Parallèlement, les observations d’animaux sont à la baisse et les détritus à la hausse. Je sais qu’on tente d’établir, à grand renfort d’études, si les activités humaines exercent une pression sur la flore et la faune du parc. En ce qui me concerne, je n’ai pas besoin d’études. Je n’ai qu’à me fier à mes observations et aux commentaires des agents du parc qui sont quotidiennement sur la ligne de front. Il faudrait revoir l’accessibilité à certains lacs, qui sont devenus de vraies piscines publiques.

Force m’est de constater que le parc du Mont-Tremblant n’est plus ce qu’il était et ça me désole. Encore une fois, au nom des impératifs économiques, un joyau de notre patrimoine naturel est rongé par le «droit de tous» de «profiter» de cette nature. Selon ma conception des choses, un droit est toujours associé à une obligation, une responsabilité.

Il semble bien que ceux qui pensent comme moi ne soient pas légion.

6 commentaires:

Anonyme a dit...

Bravo pour votre courage à porter plainte. J'espère qu'il y aura une suite et que le pilote de l'hydravion sera identifié et qu'il écopera d'une amende salée. J'aimerais qu'il soit interdit de vol pour au mins un an.
C'est comme le manoir Lupien ou les super-condos: si on est riche on peut faire ce que l'on veut.
Quant aux bouteilles ce ne sont probablement des riches, eux ils ramassent les bouteilles vides qui valent $0.10 pièce.
Il y a plusieurs années il y avait beaucoup plus de surveillants et de patrouilleurs dans les parcs.
Malheureusement on a dû couper là comme ailleurs.
On penserait que l'éducatiopn des jeunes aiderait à diminuer ce genre de problèmes mais évidemment ça ne fonctionne que partiellement.
Pourquoi pas des sorties d'école cet automne pour sensibiliser les plus jeunes?
En passan, je n'ai pas vu d'article dans Accès cette semaine.

Jean-Pierre St-Germain

André Bérard a dit...

hlbfvLa plainte est déposée officiellement à la FAPAQ. J'avais même une photo de l'appareil. Le représentant de l'organisme me soulignait que certains individus louches possèdent des plantations de «pot» à certains endroits stratégiques du parc. Il peut aussi s'agir d'un pêcheur illégal qui revenait chercher ses prises.

Concernant le journal Accès, je prends mon élan. Je serais plus présent à partir de septembre avec, entre autres, une chronique environnement/urbanisme/développement durable.

De plus, je travaille sur un gros dossier à ne pas manquer pour la mi-septembre.
AB

Anonyme a dit...

André,
c'est quoi 'hlblv"

Jean-Pierre St-Germain

Anonyme a dit...

J'ai pesé sur le mauvais bouton!
C'était bien moi qui voulais savoir ce que veut dire "hlblv"

Jean-Pierre St-Germain

André Bérard a dit...

HLBVL ne veut rien dire du tout. Les lettres de vérification se sont retrouvées là par erreur et j'ai posté mon commentaire sans m'en apercevoir. Désolé!

AB

André Bérard a dit...

Je suis tout à fait de votre avis!

AB